Voici un document très intéressant que je viens de trouver. Je n'avais jamais entendu parler de ce projet d'après-guerre... Certes, nous sommes ici en Corrèze, mais ce projet aurait influencé toute l'économie de la région, jusqu'au Cantal (ligne Bort-Neussargues). Bonne lecture !
Avant la seconde guerre mondiale, divers projets de barrages voient le jour à travers la France pour faire face aux besoins électriques croissants du pays. Des aménagements sont notamment prévus sur la
Dordogne. Commencés avant guerre, mis en sommeil durant cette dernière, ils reprennent vie après
celle-ci.
Ainsi, à la fin des années quarante, est mis en chantier le barrage de Bort les Orgues qui doit noyer la
vallée de la Dordogne sur 16 km et couper du même coup une importante ligne de chemin de fer, la
pénétrante nord du Massif Central, c'est-à-dire la ligne Paris > Aurillac, dans sa section Merlines > Bort.
Cette éventualité signifie la mort économique de la petite ville de Bort les Orgues et va déjà scinder la
population locale en deux grands clans : les pro et anti barrage. Cependant, tous sont bien conscients
que l’on ne peut accepter une telle chose et divers projets de remplacement sont mis à l’étude.
La logique voudrait qu’une nouvelle voie ferrée de contournement vienne remplacer la première.
Seulement, nous sommes dans les années d’après-guerre et en plein boum du développement des
transports routiers. Deux nouveaux clans apparaissent alors :
> Les tenants du contournement ferroviaire.
> Et les tenants d’une ligne de cars qui, selon eux, serait bien moins onéreuse et bien plus souple
que la construction d’une nouvelle voie ferrée.
Chaque solution a, bien entendu, ses avantages et ses inconvénients.
En fin de compte, les tenants du projet ferroviaire l’emporteront de justesse, surtout parce qu’EDF
s’engage à assumer le coût de cette construction en compensation du préjudice créé par le barrage. Un
tracé sera donc défini. Il prévoit une ligne passant par les plateaux entre Ussel et Bort. Celle-ci ne
comporterait aucun ouvrage d’art majeur, à l’exception d’un seul et unique grand tunnel de 6628 m de
long, en pente à 21 mm / m, seule solution valable pour descendre la haute falaise des Orgues et
atteindre le fond de la vallée où se trouve la ville. Il s’agit en effet de passer de l’altitude moyenne des
plateaux (580 m) à celle de la ville (440 m). Ce tunnel, seul gros élément du projet, sera immédiatement
mis en chantier, le reste pouvant être réalisé plus tardivement et plus rapidement.
Après quatre ans de travaux, le contexte conflictuel général était toujours aussi fort. Mais il semble qu’il y ait eu aussi une grosse mésentente technique entre EDF et la direction du chantier du tunnel, les
spécialistes du tunnel voulant creuser selon leurs règles et EDF entendant dicter ses lois et contraintes
en sa qualité de financeur. Peut-être cela explique-t-il aussi pourquoi on est allé creuser à Vioux.
Par ailleurs, en 1954, le pays s’engage dans les évènements d’Algérie et l’argent vient à manquer. Dès
lors, faute de subsides, EDF ne tient pas ses engagements et coupe le cordon de la bourse. Le chantier
est définitivement arrêté le 3 septembre 1955. Que ce soit à la Fourcherie ou à Vioux, les lieux sont très
vite nettoyés et rendus à la nature qui fait son oeuvre de camouflage.
Premier tunnel ferroviaire de France à avoir été creusé à partir d’une fenêtre et en son milieu, le tunnel
de la Fourcherie ne serait qu’un banal tunnel de chemin de fer s’il avait été terminé dans les règles et
mis en service. Long peut-être, mais sans grande originalité.
Cependant, dans ce cas précis, le recours à cette technique n’était nullement logique et justifié. C’est ce
qui rend cet ouvrage particulièrement remarquable.
>> Pour ceux que ça intéresse vraiment, voici un document de 12 pages présentant le projet.
17 et 18 avril - PLONGEE SOUTERRAINE AU TUNNEL DE LA FOURCHERIE - Des plongeurs exploreront le tunnel abandonné et noyé de la Fourcherie. Cet ouvrage, jamais terminé, aurait permis de rétablir une ligne ferroviaire entre Bort et Ussel dont la liaison avait été coupée par la mise en eau du barrage. Mais depuis bien des aspects de ce chantier ont été oubliés et le travail d'ITFF est bienvenu.
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