Deux cents ans après la bête du Gévaudan, entre 1946 et 1951, un autre prédateur sème la panique en Auvergne. Mais cette fois, on découvrira sa véritable nature... inattendue !Un quizz à faire : connaissez-vous la bête du Gévaudan ?
Janvier 1947, au village de Bonneval, en Haute-Loire. Des cris résonnent dans cette froide nuit d'hiver. Ils viennent de la forêt voisine. Personne ne s'enfonce dans l'obscurité des bois pour vérifier mais plusieurs habitants s'interrogent. Et si c'était la bête ? Au matin, les élèves de l'école en sont persuadés. Tandis qu'ils suivent leur institutrice sur la route qui traverse le bourg pour leur cours de gym, un troupeau de moutons apeurés leur barre brusquement le passage. À leur trousse, une grosse bête aux oreilles pointues. Celle-ci parvient à rattraper une pauvre brebis et lui entaille le cou, sous les yeux des enfants qui crient.
L'ours de SauguesOn connaissait déjà la bête du Gévaudan sur ces terres de Haute-Loire. Mais depuis plusieurs mois, c'est un autre prédateur qui fait des ravages et excite la presse. On l'a baptisé « la bête du Cézallier », parce qu'il a débuté ses forfaits vers Issoire en septembre 1946.
On ne lui connaît aucune victime humaine, seulement des animaux : chèvres, chien, taureaux... Mais dans l'Auvergne d'après guerre, ses carnages s'avèrent dramatiques. La viande manque. Les gendarmes doivent parfois saisir le bétail invendu des agriculteurs désespérés pour le rationnement de la population. Du coup, la psychose s'installe.
Les descriptions que font les témoins varient du crédible à l'absurde : si les écoliers de Bonneval parlent d'un gros chien, d'autres évoquent un loup. À Riom-ès-Montagnes (Cantal), on signale « un tigre, avec des pattes énormes ». À La Chaise-Dieu (Haute-Loire), Georges Brivady croit voir une panthère dévorer un renard. La rumeur enfle, les témoignages sont de plus en plus farfelus. À Saugues (Haute-Loire), on se lance à la chasse à l'ours !
À Tauves (Puy-de-Dôme), un agriculteur abat une bête : « elle avait une tête de fouine, des oreilles pointues, une queue très longue, un pelage de panthère ». Sur la foi de ce témoignage, une partie de la presse conclut à... une genette, un carnassier africain. L'éternel fantasme de l'animal exotique dans les campagnes françaises...
Le loup de GrandrieuLa panique donne lieu à des dérapages. À Pléaux (Cantal), deux jeunes s'affolent en apercevant un animal s'approcher d'eux. Ils supplient les chasseurs locaux d'abattre la créature. Ce qu'ils font. Hélas... C'était leur propre chien !
Selon les auteurs Jean-Louis Brodu et Michel Meurger, qui ont mené une étude sur cette affaire, certains villageois ont longtemps cru à une théorie fumeuse : des maquisards encore cachés dans les bois auraient capturé du bétail pour se nourrir et mutilé des carcasses pour faire croire à une bête féroce...
Mais c'est en 1951 que l'affaire trouve son issue. À Grandrieu, en Lozère, là où la bête du Cézallier avait étendu sa chasse, on abat...un grand loup. Point d'animal exotique. Sauf que...
Il semble difficile d'attribuer tous les carnages à un seul animal. Or, en 1947, les gendarmes font une surprenante découverte. En juin, à Saint-Germain-de-Teil (Lozère), des paysans donnent l'alerte : on vient de voir la bête du Cézallier. Les forces de l'ordre se pressent sur place. Débusquent l'animal. Et le tuent. Ce jour-là, ce n'était ni un gros chien ni un loup qui gisait à leurs pieds mais... une lionne ! Elle s'était échappée d'une ménagerie près de Limoges.
Source : Thibaut SOLANO in La Montagne Dimanche, dimanche 28 novembre>> Si le sujet vous intéresse... (article connexe)